Je m’appelle Sunil. Je suis employé dans une petite entreprise à Rose-Hill, je gagne un peu plus que le salaire minimum, et comme beaucoup d’autres, j’avais un rêve simple : acheter ma première voiture. Pas une grosse cylindrée. Pas une neuve qui brille dans une salle d’exposition. Juste une petite d’occasion, fiable, pour pouvoir aller au travail sans dépendre des bus bondés, pour sortir en famille le week-end, pour vivre un peu mieux. Mais aujourd’hui, ce rêve s’éloigne. Pire : il s’effondre.
Depuis le Budget 2025-2026, tout a augmenté. Les droits d’accise, les frais d’enregistrement, même la taxe sur les voitures hybrides et électriques est revenue. Les voitures d’occasion, qui étaient l’espoir des petites gens comme moi, ont pris un coup dur.
Le concessionnaire m’a dit que la petite japonaise que je regardais depuis des mois a désormais grimpé de Rs 100 000. Cent mille roupies ! C’est plus que ce que je gagne en six mois. Et je ne parle même pas des intérêts bancaires qui ne cessent d’augmenter.
Et comme si ça ne suffisait pas, le coût de l’assurance, de la plaque, du fitness, et même des services de douane ont pris l’ascenseur. Le ministre dit que c’est pour freiner l’explosion du parc automobile. Peut-être. Mais moi, je ne suis pas responsable de cette explosion. J’ai attendu, économisé, sacrifié des sorties, renoncé à des plaisirs, juste pour me rapprocher un peu de ce rêve. Maintenant, on me dit qu’il faut attendre encore. Ou tout simplement renoncer.
Je comprends qu’il faille protéger l’environnement, lutter contre les embouteillages, encourager le transport en commun. Mais qu’on ne vienne pas me dire que les riches vont souffrir de ces mesures. Eux, ils achèteront toujours leurs SUV, leurs voitures de luxe, peu importe les taxes. Ceux qui trinquent, ce sont les travailleurs comme moi, les petits salariés, les jeunes couples, les familles modestes. Ceux pour qui la voiture n’est pas un luxe, mais un outil de liberté. Aujourd’hui, je suis découragé. Mais je ne suis pas en colère contre le progrès. Je suis en colère contre l’injustice. Il fallait peut-être réformer, oui. Mais pas sans
concertation. Pas sans penser à nous, les hommes et les femmes de la rue.
Moi, je ne demande pas la lune. Juste un peu de respect. Et qu’on ne m’enlève pas le peu d’espoir que j’avais réussi à construire, quatre pneus à la fois.
TRIBUNE – Moi, l’homme de la rue, face au rêve brisé de la voiture
