Ajay Teerbhoohan : « Je suis la preuve qu’un simple coiffeur peut faire bouger les lignes »

ByRédaction

May 14, 2025

Il taille des barbes le jour, taille le système la nuit. Dans un coin vibrant de Vallée-des-Prêtres, un coiffeur a défié les pronostics, les partis et les certitudes. Ajay Teerbhoohan, l’homme qui a renversé les codes municipaux, est désormais conseiller de Port-Louis. Indépendant, au sens politique comme moral.

Journal du Dimanche (JDD) : Pour ceux qui ne vous connaissent pas encore, qui est Ajay Teerbhoohan ?
Ajay Teerbhoohan : Je suis né et j’ai grandi à Vallée-des-Prêtres, dans une famille modeste. Mon père, feu Bye Rabin, était ouvrier dans plusieurs compagnies privées. Il était un grand militant du MSM. Ma mère travaille toujours dans les champs. Moi, je suis coiffeur de profession, installé dans mon quartier. Je suis marié à Jaya Pradha et j’ai une fille, Avnee, qui est étudiante.

JDD : Vous n’êtes pas issu du sérail politique traditionnel. Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer ?
Ajay Teerbhoohan : En 2015, je me suis présenté une première fois. J’étais arrivé sixième dans mon ward, ce qui m’avait permis de dépasser plusieurs candidats de grands partis. C’était déjà un signal fort. Cela m’a donné de la force, de la foi aussi.
J’ai compris que les citoyens veulent du concret, de la proximité, pas des promesses de façade. J’ai attendu, écouté, observé. Et je me suis relancé, plus déterminé que jamais.

JDD : Cette fois, vous êtes arrivé en tête. Comment expliquez-vous ce succès ?
Ajay Teerbhoohan : J’ai fait une campagne à l’ancienne, humaine. Du porte-à-porte, des échanges directs, sans fioritures. J’ai reçu un accueil chaleureux partout. Les gens m’ont vu grandir ici, ils connaissent ma famille, mon travail. Je suis un homme du quotidien. J’ai aussi été soutenu par des amis fidèles comme Ashwin Rampadaruth et Arshad Seeder. Ensemble, on y a cru jusqu’au bout.

“Une campagne à la main, une victoire au cœur”

JDD : Avez-vous été surpris de votre victoire ?
Ajay Teerbhoohan : J’étais confiant d’avoir une bonne place, mais je ne pensais pas sortir en tête. C’est une immense joie et un grand honneur. Je tiens aussi à saluer mes amis indépendants qui ont fait de très bons scores : Oudesh Unmole avec 917 voix, René Gervais Robert avec 583. Cela prouve qu’il y a de la place pour les voix libres dans notre démocratie.


JDD : À qui dédiez-vous cette victoire ?

Ajay Teerbhoohan : D’abord à mon père. S’il avait été là, il aurait été fier, ému, comblé. Il m’a transmis des valeurs de droiture et de courage. Ma mère, ma femme, ma fille ont été formidables tout au long de cette campagne. Et je n’oublie pas tous ceux qui m’ont aidé, de près ou de loin.


JDD : Quels seront vos premiers combats en tant que conseiller ?
Ajay Teerbhoohan : Je veux que les choses bougent rapidement. On parle souvent de projets grandioses, mais les citoyens attendent du concret : des routes asphaltées, des drains efficaces, des abris d’autobus décents, surtout à Vallée-des- Prêtres. Je serai une voix vigilante, une oreille attentive et un acteur déterminé.

“ Je suis indépendant. Et je le resterai.”

JDD : Des rumeurs disent que vous êtes proche du MSM. Que répondez-vous?
Ajay Teerbhoohan : Ce sont des rumeurs sans fondement. Je suis ami avec des gens de tous les partis : MSM, PTr, MMM. Mais je ne représente aucun parti. Je suis indépendant. Je ne dois rien à personne, si ce n’est aux habitants de mon quartier.


JDD : Et si un parti traditionnel vous proposait de le rejoindre ?
Ajay Teerbhoohan : Je déclinerais. Mon engagement est clair : rester indépendant pour pouvoir parler et agir librement. C’est ce qui m’a permis d’être élu. Je n’ai pas l’intention de trahir cette confiance.


JDD : Quel regard portez-vous sur le fort taux d’abstention ?
Ajay Treebhoohan : Je trouve ça dommage. Cela faisait dix ans que les citadins n’avaient pas voté. C’était un moment à ne pas rater. Beaucoup ont perdu confiance dans le système. C’est à nous, les élus, de leur montrer que leur voix compte.

Aux jeunes : “N’attendez pas le feu vert”

JDD : Le gouvernement en place a pris les rênes depuis quelques mois. Quel est votre souhait ?
Ajay Treebhoohan : Je souhaite qu’il tienne ses promesses. Il faut des résultats concrets, pas juste des annonces. Il faut améliorer la qualité de vie, surtout pour les plus vulnérables. Le prochain budget sera un test important.


JDD : Quel message aimeriez-vous adresser aux jeunes ?
Ajay Teerbhoohan : Lancez-vous. N’attendez pas qu’on vous donne la permission. Moi, je suis coiffeur, pas politicien de formation. Et j’ai été élu. Tout est possible si on a la volonté et la sincérité. Le pays a besoin de sang neuf, de visages neufs, de convictions.


JDD : Un dernier mot ?
Ajay Treebhoohan : Je remercie tous ceux qui m’ont soutenu. Maintenant, le vrai travail commence. Je ferai à la hauteur de la confiance que les habitants ont placée en moi. Je veux leur prouver qu’un simple coiffeur peut être un vrai acteur du changement.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *