Goorooduth Chuttoo : Le veilleur de mémoire dans une maison qui bat comme un cœur

ByRédaction

June 30, 2025

À Rose-Belle, nichée entre un jardin fleuri et les échos discrets d’un quartier tranquille, se trouve une maison qui, à première vue, n’a rien d’extraordinaire. Mais dès qu’on franchit le seuil, on comprend
que l’on entre dans un autre espace-temps. Ici, chaque recoin murmure, chaque objet vibre. Il ne
s’agit pas seulement d’un musée. Il s’agit d’un cœur qui bat encore.
Goorooduth Chuttoo, 73 ans, est le gardien de ce sanctuaire. Ancien policier, illusionniste, mais aussi historien autodidacte, il a transformé sa maison en un lieu unique : le Musée de la Petite Collection. Un endroit où le patrimoine ne dort pas derrière des vitrines, mais respire dans la chaleur d’un foyer. On y trouve une lampe à pétrole, un vieux cahier d’école, des objets rouillés, usés… mais surtout remplis de vie.

Un livre comme une offrande
Avec Musée de la Petite Collection : Where Heritage Comes Alive, Goorooduth franchit une nouvelle étape. Ce livre, pensé comme un carnet de bord autant qu’un manifeste culturel, n’est pas un simple
recueil de souvenirs. C’est une déclaration d’amour. À son île. À son peuple. À l’histoire. À la mémoire.
« Ce livre est un miroir, une carte et une clé. Il ne m’appartient plus : il est à vous », écrit-il. Ce n’est
pas un ouvrage académique. C’est une invitation à ressentir. À revisiter notre propre histoire à travers celle des objets les plus simples. Une théière, une montre cassée, tout devient symbole, témoin, mémoire.
Goorooduth ne cherche pas à impressionner. Il cherche à toucher. À émouvoir. À faire résonner.
Dans chaque page, dans chaque anecdote, on sent le respect profond qu’il porte au vécu de ceux qui
ont tracé les chemins d’aujourd’hui.

Une famille au cœur du projet
Rien de tout cela n’aurait été possible sans l’amour indéfectible de sa femme, Vishwanee, complice de toujours, et le soutien constant de leurs deux fils, Sailesh et Dilesh. Chez les Chuttoo, la mémoire n’est pas une mission solitaire. C’est une affaire de famille. Un héritage que l’on porte à plusieurs, dans le rire et parfois dans les larmes.
C’est dans cette complicité que réside la force du projet. Goorooduth est le visage, mais tous y mettent du cœur. Une famille qui croit, ensemble, que préserver la mémoire, c’est préserver ce que nous avons de plus précieux : notre humanité.

Le bâtisseur de ponts
Tout au long de sa vie, Goorooduth a construit des ponts. Entre générations. Entre communautés. Entre passés et futurs. Il est aussi l’instigateur du Gandhi Square à Rose-Belle, un lieu symbolique, érigé comme un appel à la paix et à l’unité. Ce carré de pierres n’est pas là pour décorer, mais pour rappeler. Que la paix se construit dans les gestes. Dans les regards. Dans la mémoire collective.
C’est cette même philosophie qui imprègne son livre. À chaque chapitre, il tend la main. Il invite. Il rassemble. Il nous pousse à regarder en arrière non pas pour regretter, mais pour honorer.

Une mémoire de migration
L’un des chapitres les plus poignants du livre revient sur son voyage au Bihar, en Inde, sur les traces des premiers engagés mauriciens. Ce périple, il ne l’a pas entrepris en historien mais en fils du sol. Il y a retrouvé des noms, des villages, des regards. Il y a compris que notre identité mauricienne est une mosaïque précieuse, née de souffrances, de résistances, de rencontres.
« Notre héritage n’est pas un fil, mais une tapisserie tissée de migration, de foi, d’amour et de renaissance », écrit-il. Et dans cette tapisserie, chaque lecteur peut reconnaître une parcelle de son propre récit. Ce livre devient alors un miroir tendu à tous les Mauriciens, d’ici et de la diaspora.

Un musée dans une maison, une maison dans l’histoire
Le Musée de la Petite Collection n’a ni billets d’entrée, ni horaires fixes, ni guides professionnels. Ce qu’il offre est bien plus rare : l’émotion brute. Chaque objet exposé y a été récupéré, restauré, raconté. Une marmite cabossée devient un chapitre de l’histoire culinaire. Une radio à manivelle se fait écho des dimanches en famille. Une chemise d’écolier raconte la rigueur et l’espoir.
« Ce musée ne montre pas, il fait ressentir. Ici, la mémoire palpite dans chaque recoin », affirme Goorooduth. À l’heure où tout va vite, où l’on jette plus qu’on ne garde, ce musée enseigne une
autre valeur : celle du temps. Celle de la transmission. Celle de l’écoute.
Le livre de Goorooduth Chuttoo n’est pas un testament triste. C’est une célébration. Une fête de la mémoire. Il dit avec clarté : n’attendons pas que tout disparaisse pour nous souvenir. Il exhorte à
l’action. À raconter nos histoires. À écouter celles des autres. À garder les recettes, les chants, les
gestes. À transmettre. Il s’adresse aussi aux Mauriciens du monde entier. À ceux de Londres, de
Sydney, de Paris, de Johannesburg. Il leur tend un fil : « Venez. Revenez. Réappropriez-vous votre
histoire. Elle vous attend. »

Le Mauricianisme comme boussole
Au fond, ce que Goorooduth propose, c’est une philosophie. Il l’appelle le Mauricianisme. Un sentiment d’appartenance au-delà des origines, des langues, des religions. Un lien invisible mais solide entre ceux qui partagent la mémoire de cette île. Ce livre en est le manifeste poétique. Avec ses mots simples, ses souvenirs tendres, ses objets familiers, Musée de la Petite Collection : Where Heritage Comes Alive nous apprend à aimer autrement. À aimer plus profondément. À aimer en se souvenant.

Un livre à lire, un lieu à vivre

Le livre est disponible dès maintenant dans les librairies partenaires. Le musée, lui, est ouvert sur rendez-vous, à Rose-Belle. Il n’attend pas les foules, mais les âmes curieuses. Les enfants émerveillés. Les anciens émus. Les jeunes en quête de repères.
Goorooduth Chuttoo n’écrit pas pour être lu. Il écrit pour que l’on se souvienne.